Perceptions des utilisateurs ayant une déficience visuelle concernant l’utilisation des électroménagers et la nécessité d’améliorer la connaissance ou l’expérience utilisateur pour des innovations futures

Le Regroupement des aveugles et amblyopes du Montréal métropolitain (RAAMM), notre partenaire, a pour objectif de soutenir et d’améliorer ‘les conditions de vie des personnes aveugles et malvoyantes afin d’atteindre leur pleine et entière participation sociale.’ Or, les personnes malvoyantes ou aveugles sont particulièrement exposées aux incidents domestiques en particulier depuis l’arrivée des électroménagers tactiles. Dans une dynamique sociale inclusive, le RAAMM a conscience que l’utilisation des électroménagers, comme la cuisinière, le lave-vaisselle, la sécheuse, ou encore le micro-ondes, est nécessaire pour être en mesure de réaliser des activités de la vie quotidienne (AVQ). Pourtant, des limitations d’activités se sont accrues ces dernières années avec l’évolution du design, de la technologie et l’apparition d’électroménagers avec écrans tactiles ou proposant des touches par effleurement sans bouton physique. Si les spécialistes en intervention en déficience visuelle peuvent parfois proposer des solutions telles que l’ajout de boutons poussoirs sur des électroménagers tactiles, ils sont davantage démunis quant aux électroménagers utilisables par effleurement. Finalement les appareils font de plus en plus appel à la vision, leurs conceptions à faible contraste et un retour d’information tactile insuffisant font qu’il est difficile de distinguer les éléments de l’interface et de reconnaître leur fonction. Par conséquent les électroménagers ne sont pas tous accessibles aux personnes avec déficiences visuelles qui sont souvent dépendantes d’un tiers pour réaliser des activités tels que cuisiner (ex. programmer un four ou un micro-ondes, un robot culinaire), laver et sécher son linge, utiliser un lave-vaisselle.

L’enquête canadienne sur l’incapacité (ECI) de 2012 menées auprès des plus de 15 ans a révélé que 2,8 % des Canadiens adultes vivaient avec une incapacité visuelle (756 300 personnes), dont 5.8% de personnes aveugles, et étaient limités dans leurs AVQs. Le RAAM comporte à lui seul 300 membres, et adhère au Regroupement des aveugles et des amblyopes du Québec (RAAQ) dont les différents réseaux rapportent les mêmes problématiques. C’est pourquoi, dans une société où la technologie est omniprésente, la RAAMM est demandeuse d’une meilleure connaissance de la perception des utilisateurs ayant une déficience visuelle concernant l’utilisation de leurs électroménagers et la nécessité d’améliorer la connaissance ou l’expérience utilisateur pour des innovations futures.

Problématique

La déficience visuelle a un impact profond sur un large éventail d’activités quotidiennes, tel que la préparation des repas ou l’entretien ménager qui sont des activités importantes, significatives des AVQs et qui influencent la satisfaction des individus ; c’est pourquoi il est primordial d’aborder cette question et d’étudier les défis auxquels sont confrontées les personnes aveugles et malvoyantes. Des études ont signalé que les personnes ayant une déficience visuelle rencontrent des obstacles dans l’acquisition de compétences fonctionnelles en matière d’alimentation, notamment des difficultés d’accès aux instructions culinaires, des obstacles dans la manipulation des outils et équipements de cuisine en toute sécurité. Li et al. ont mené des entretiens auprès de 12 personnes ayant des déficiences visuelles qui ont permis de mieux comprendre le point de vue des participants et les difficultés qu’ils rencontrent pour cuisiner, comme l’utilisation de techniques spéciales, les expériences avec des appareils d’aide à la cuisine, et l’adaptation des électroménagers pour les rendre accessibles. Plus récemment, la RAAQ a mené une consultation sur l’accessibilité des appareils électroménagers auprès de 113 adultes ayant une déficience visuelle ou auditive. Environ 70 personnes ayant une limitation visuelle estiment que l’offre d’appareils électroménagers ne répond pas à leur aux besoins, ils éprouvent des difficultés pour consulter le manuel d’utilisation de l’appareil (85%), ont eu recours à des adaptations techniques pour améliorer l’accessibilité de leurs appareils électroménagers (89%) et, à l’instar  2 de la littérature, 78% des participants ‘estiment que le manque d’accessibilité des appareils électroménagers a un impact négatif sur leur qualité de vie’. Par ailleurs, les usagers rapportent avoir un soutien limité des centres de réadaptations pour l’achat d’un appareil électroménager.

Peu de recherches ont été entreprises pour déterminer les solutions permettant de faciliter l’utilisation des électroménagers pour les personnes ayant une déficience visuelle. Cependant, les appareils électroniques dotés d’éditeurs vocaux, d’informations sur le processus de cuisson, de capteurs pour verser les liquides et d’appareils pour éplucher les légumes étaient considérés comme utiles. Kashyap  a indiqué que l’utilisation de marqueurs tactiles sur les appareils électroménagers, l’ajout de minuteurs auditifs et de jauges de température peuvent améliorer la capacité à cuisiner. Bien que des solutions technologiques existent telles que les commandes vocales, les dispositifs vibrotactiles, etc. peu de constructeurs les intègrent dans la fabrication des appareils électroménagers ce qui ne les rend pas utilisables pour la population ciblée. Tschakert et al. ont récemment testé l’utilisation de la réalité augmentée chez six utilisateurs ayant une déficience visuelle qui ont été capable de reconnaître des éléments de contrôle imperceptibles sans l’application d’assistance. Néanmoins, l’analyse automatique et l’augmentation des interfaces constituent une étape importante vers l’interaction indépendante des personnes malvoyantes avec leur environnement quotidien. À la lumière des résultats de ces initiatives récentes, et malgré l’importance perçue du sujet, il semble qu’il y ait peu de recherches sur les questions liées à l’utilisation des électroménagers en tant que facteur déterminant de la participation sociale et de l’inclusion des personnes souffrant de déficience visuelle.

Objectif général

Développer des recommandations vis-à-vis de l’utilisation des appareils électroménagers tant pour les usagers que pour les fabricants. Plus spécifiquement nous développerons (i) des fiches techniques à l’usage des personnes ayant une basse vision pour les soutenir dans le choix de leurs appareils (utilité, facilité d’utilisation, possibilité d’adaptation) et (ii) des recommandations pour les constructeurs/acteurs de l’industrie.

Modèle théorique

Le modèle théorique d’acceptation de la technologie ou Technology Acceptance Model (TAM) (annexe 1) sera utilisé dans cette recherche ; il est largement utilisé pour comprendre et prédire l’adoption des technologies par les individus. Il repose sur deux concepts clés : la « perception de l’utilité » et la « facilité d’utilisation ». Selon ce modèle, les personnes sont plus susceptibles d’adopter une technologie si (i) elles croient qu’elle leur sera utile dans leur vie (amélioration de la performance), et (ii) si elles perçoivent leur utilisation comme facile et sans effort.

État d'avancement global
Éthique
Étape 1 Analyse des besoins des utilisateurs de connaissances
Étape 2. Codévelopper et valider les fiches techniques et rédiger les recommandations
Diffusion et transfert de connaissance
Membres de l'équipe

Chercheurs et chercheuses principaux :
– Frédérique Poncet, École de Physiothérapie et d’ergothérapie de McGill, École d’optométrie de l’UdeM
– Jeremy Cooperstock, Faculty of Engineering, McGill

Partenaire principal :
– Pascale Dussault, Regroupement des aveugles et amblyopes du Montréal métropolitain (RAAMM)

Personne avec un savoir expérientiel :
– Pascale Dussault

Autres membres de l’équipe et affiliations :
– Walter Wittich École d’optométrie / Université de Montréal; CRIR, REPAR, Responsable scientifique Institut Nazareth et Louis Braille et Centre Mackay (Montréal), Réseau de recherche en santé de la vision (RRSV)

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